L’ancien ministre de la Justice sénégalais, Ismaïla Madior Fall, a été placé sous bracelet électronique avec assignation à domicile ce mardi 20 mai 2025 par la Commission d’instruction de la Haute Cour de Justice. Cette décision intervient après son audition dans une affaire impliquant des soupçons de corruption passive et de détournement de deniers publics, liée à un marché controversé pour la construction d’un centre de surveillance électronique .
Les faits incriminés
L’enquête porte sur des irrégularités présumées dans l’attribution d’un contrat public pour la réalisation d’un centre de surveillance par bracelets électroniques au tribunal de Pikine-Guédiawaye. Le promoteur immobilier Cheikh Guèye, l’un des plaignants, accuse l’ancien ministre d’avoir exigé un pot-de-vin de 250 millions de FCFA, dont 50 millions auraient été versés en espèces en présence de Mohamed Anas El Bachir Wane, ancien directeur des Constructions au ministère de la Justice .
Si Ismaïla Madior Fall reconnaît avoir reçu les 50 millions, il affirme les avoir restitués « diplomatiquement », qualifiant cette somme de « don gracieux » sans lien avec le marché . Une version contestée par les enquêteurs, qui y voient une tentative de corruption.
Mesures judiciaires et implications
La Commission d’instruction a opté pour une mesure restrictive plutôt qu’une détention : le bracelet électronique, ironiquement similaire au dispositif que devait gérer le centre incriminé .Deux autres acteurs clés, Cheikh Guèye et Mohamed Wane, ont été placés en détention préventive pour escroquerie, corruption, et blanchiment .
Répercussions politiques et académiques
Cette affaire ébranle l’image d’un ancien garde des Sceaux perçu comme un pilier des réformes judiciaires. Elle soulève aussi des questions pratiques, comme la possibilité pour Madior Fall, professeur de droit à l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD), de poursuivre son enseignement sous surveillance électronique .
Le cas Madior Fall illustre les défis de la moralisation des marchés publics au Sénégal, particulièrement dans les projets judiciaires. Alors que l’enquête se poursuit, la Haute Cour de Justice doit démêler le vrai du faux dans un dossier où les versions s’affrontent, sous le regard d’une opinion publique attentive à la lutte contre l’impunité .
Yankhouba Thiam